Il faut l'avouer, Eris a le physique d'une poupée et elle a bien compris que son visage aux traits juvéniles et doux pouvait être un excellent outil de travail, pour s'attirer la confiance des gens. De taille assez petite - merci les origines asiatiques de papa, maman - elle a de longs cheveux noirs qu'elle attache, tout le temps. Que ce soit une queue de cheval, un chignon rapide ou une tresse, elle ne lâche jamais ses cheveux. Son visage est un véritable masque de théâtre. Elle s'en sert énormément. Les traits doux de ses joues, de sa bouche, de ses grands yeux brillants sont extrêmement trompeurs. Elle peut afficher le mépris et la haine aussi facilement que la sympathie et le bonheur. Le rire aux larmes, Eris maîtrise très bien et porte sans cesse un masque. Elle ne montre pas ce qu'elle ressent lorsqu'elle ne le souhaite pas, se cachant derrière un sourire sarcastique. Ah oui, et son charme réside dans un minuscule grain de beauté sur le haut de sa pommette droite.

Il y a deux phases, dans l'évolution du caractère d'Eris. La phase prè-assassinat et la phase post-assassinat. Avant, Eris était tout le contraire de ce que son prénom pouvait laisser présager. Une petite gryffondor sans histoires, douce, attendrissante, loyale, courageuse, souriante, téméraire y tutti quanti. Miss je-suis-aussi-chiante-que-la-pluie, quoi ! Et puis est arrivé l'assassinat de sa mère, la faisant devenir ce qu'elle est aujourd'hui. Sous ses faux airs de poupée de porcelaine, Eris est un l'incarnation même de la cruauté. Elle n'a aucun respect pour la vie humaine, que ce soit pour la sienne ou pour celle des autres. Elle ne s'attache à personne, ce qui à ses yeux, est le point faible de beaucoup d'hommes et de femmes. Cruelle, sadique, manipulatrice, sarcastique, cynique, Eris donne froid dans le dos. Mais toute cette violence cache une peur de ressentir des sentiments pour quelqu'un. Depuis qu'elle a vu sa mère mourir sous ses yeux, Eris ne veut plus rien ressentir. Elle a occulté son passé et est devenue la digne mangemorte qu'elle restera toute sa vie.

Mulan lança un regard amouraché à l'homme debout à ses côtés. Dans ses bras dormaient les deux plus beaux bébés de la terre, blottis l'un contre l'autre dans une couverture blanche. Han s'approcha, caressant le visage de son épouse. Les deux jeunes parents baissèrent les yeux vers leur progéniture. Eris et Zheng Ye-Hou. De charmants noms, pour de si petits enfants. Une sorcière-infirmière entra dans la chambre, félicitant le couple. Elle baragouina quelques mots en russe avant de ressortir. Un médicomage entra à son tour, demandant aux deux parents quelle serait la nationalité des jumeaux. Mulan et Han échangèrent un regard hésitant. Elle, était chinoise ; lui était vietnamien. Ils s'étaient rencontrés à l'université de Prague, s'étaient mariés à Rio de Janeiro et leurs deux enfants venaient de naître à l'hôpital magique de Vladivostok. Sans oublier que le couple résidait officiellement à Dakar. Russes. Ils seront russes, finit par trancher leur père. L'avenir fit qu'Eris se trouva mi-russe, mi-sénégalaise ; tandis que Zhang devenait mi-russe, mi-chinois. Une étrange affaire politique...


M'man ! M'MAAAAN ! hurla Eris en courant à travers la grande maison. Zhang vole ! Zhang vole ! cria-t-elle lorsqu'elle eut enfin trouvé sa mère, qui bronzait sur la terrasse de la superbe villa sénégalaise. Mulan se précipita dans la chambre que partageaient les jumeaux et trouva son fils allongé, à quelques centimètres du sol, ne touchant rien. Elle éclata de rire et le serra dans ses bras. Tu es un sorcier toi aussi, mon canard, dit-elle en caressant les cheveux sombres du petit garçon de sept ans. C'est alors qu'Eris envoya voler à travers la pièce le pyjama de Zhang, en pleine figure de son frère. Mulan se retourna, interdite. Eris, les mains derrière le dos, regardait le pyjama échoué sur le sol avec un air effaré. Elle releva la tête et éclata de rire. Mulan serra ses deux enfants dans ses bras. Les pouvoirs qu'elle et son mari avaient étaient passés à la génération suivante. Il n'y aurait point de Cracmols pour déshonorer la famille.


Chérie, tu ne crois pas qu'il serait temps que tu fasses autre chose que rester sur ce canapé toute la journée ? dit monsieur Ye en s'agenouillant devant sa fille. EN CONSTRUCTION


Le volet de la grande maison de pierres battait violemment contre le mur. Les gonds à moitié arrachés, le morceau de bois peint en rouge cognait contre la paroi de la maison qui abritait la famille Ye-Hou depuis près de dix ans. Au-dessus de l'imposante demeure planait l'astre argenté de la Lune, son ombre menaçante recouvrant le jardin où Mulan s'était tant de fois réfugiée pour apprendre à sa fille les vertus des tisanes naturelles. Les roses se faneraient, l'hiver recouvrirait tout le bonheur de cette famille détruite. Les allées ne seraient plus jamais entretenues, les bosquets de bégonias ne recevraient plus jamais de coups de sécateur. Mulan Ye-Hou ne s’assiérait plus jamais sous la jolie tonnelle de bois blanc. Son corps, froid et sans vie, était allongé dans le salon, sur le tapis aux franges noires. Les yeux grands ouverts, le visage vide de toute expression, elle ne pourrait plus jamais serrer dans ses bras son mari allongé près d'elle. Mulan et Han ne pourraient plus jamais embrasser leurs enfants. Debout près des deux corps sans vie, quatre aurors. On devait les arrêter, pas les tuer, bougre de bouse d'hippogriffe, lança le chef à l'un de ses adjudants, visiblement énervé. Deux mangemorts de moins, ça ne peut faire de mal à personne, maugréa l'un des coupables. Le chef leva les épaules et sourit. M'ouais, t'as pas tort. Bon, faut qu'on trouve leurs deux gosses. Blueback, t'as trouvé les jumeaux ? La réponse fut négative. Les quatre aurors emportèrent les corps des deux mangemorts, laissant la maison vide et sans surveillance. Lorsqu'ils eurent transplané, un hurlement déchira l'air. Cachés sous le plancher du salon, comme leurs avaient appris leurs parents en cas d'attaque, Eris et Zhang avaient tout vu. Les yeux des deux adolescents de vingt-trois ans n'avaient rien manqué et n'oublieraient jamais rien.


La porte du bureau s'ouvrit à la volée, laissant place à une femme vêtue de noir. Sa longue cape frôlait le sol. Elle rabattit sa capuche, laissant apparaître un teint de porcelaine, encadré par des cheveux de jais. Un sourire sadique flottait sur les lèvres de la nouvelle venue. L'auror se leva, tendant la main vers sa baguette. Je ne ferais pas ça à votre place, murmura Eris en lançant un expelliarmus vers la baguette. Qui êtes-vous ? demanda l'auror. Qui je suis ? C'est vrai que vous ne m'avez jamais vue, mais mon visage devrait vous rappeler quelqu'un. Je ressemble beaucoup à ma mère, vous savez, dit-elle en s'asseyant sur le bureau en acajou, croisant les jambes. Attendez... vous êtes la fille de... Eris éclata de rire, emplissant la pièce de toute la cruauté qu'elle renfermait. Vous voyez, quand vous voulez ! Sectumsempra dit-elle avec un murmure. L'homme tomba à terre, tandis que les images de son père et de sa mère inertes et blancs comme la mort resurgissaient dans sa mémoire. Elle cessa son sortilège et vint s'agenouiller près de l'auror qui reprenait son souffle, le corps traversé de larges entailles sanguinolentes. Vous avez les salutations de mes parents, murmura-t-elle de nouveau avant de se relever. Avada Kedavra. Une lumière verte inonda la pièce. L'auror expira. Un sourire apparut à la commissure des lèvres d'Eris lorsqu'elle leva sa baguette vers le plafond, faisant apparaître la marque des Ténèbres au-dessus de la maison londonienne. Puis elle transplana, arrivant dans la maison où elle avait grandi et où ses parents avaient été assassinés. Laissant tomber son manteau sur le sol, elle monta jusque dans sa chambre. Sur le mur face à la porte, étaient les quatre photos animées des aurors qui avaient perpétré le crime, ce soir-là. D'un sortilège, elle brûla la photo de l'auror qu'elle venait de tuer. Plus que trois. Elle avait vingt-quatre ans et toute sa vie devant elle, pour venger ses parents. Elle regarda son reflet dans le miroir. La petite fille de Gryffondor cachant que ses parents étaient des mangemorts n'était plus. Elle était morte en même temps que Mulan et Han. Ces quatre aurors avaient crée leur pire ennemi. La seule personne capable de tous les anéantir, puisqu'elle n'avait plus rien à perdre.